Huit jours après le scrutin présidentiel du 12 octobre, le Cameroun retient son souffle. Selon les chiffres provisoires publiés par la Commission nationale de recensement des votes, le président sortant Paul Biya arrive en tête avec 53,66 % des suffrages, soit 2 474 179 voix. Un résultat qui, s’il se confirme, prolongerait de sept années supplémentaires le règne du chef de l’État, au pouvoir depuis 1982.
Mais le camp adverse ne décolère pas. Son principal rival, Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre et candidat du Front pour la Restauration Nationale (FRN), rejette catégoriquement ces résultats. Dans une conférence de presse tenue lundi soir à Yaoundé, il a brandi des procès-verbaux issus, selon lui, de plusieurs commissions locales, affirmant qu’ils le placent largement en tête avec environ 60 % des voix. « Ces chiffres officiels sont une fabrication politique. Le peuple camerounais a voté pour le changement », a-t-il déclaré, appelant à la “vigilance démocratique” et à une “mobilisation pacifique” de ses partisans.
Du côté du RDPC, les réactions se veulent mesurées. Un membre influent du parti présidentiel assure que le scrutin s’est déroulé dans le respect des lois électorales, évoquant “une victoire légitime et attendue”. L’opposition, elle, évoque des irrégularités dans certaines régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, où des observateurs internationaux auraient signalé des interruptions de vote et des disparitions d’urnes.
La tension monte dans les grandes villes, où des appels à manifester circulent sur les réseaux sociaux. À Yaoundé comme à Douala, les forces de sécurité ont été déployées autour des institutions et des sièges de partis politiques. La Cour constitutionnelle doit désormais se prononcer sur la validation définitive des résultats, une étape cruciale qui pourrait redessiner le paysage politique camerounais.
À 92 ans, Paul Biya joue peut-être l’une de ses dernières cartes politiques. Ses soutiens saluent “la victoire de la stabilité”, tandis que ses détracteurs dénoncent “un passage en force institutionnel”. L’histoire, une fois encore, semble suspendue entre continuité et contestation.


